Je viens de retirer mon DVD récemment acquis de ma platine de salon...
Commençons par le commencement. Que savais-je de Sin City? Je savais que c'était de monsieur Miller. Connaissant sa réputation, je me suis dit "chouette", ça pourrait être intéressant. Je connaissais une partie du casting, et c'était plutôt convaincant. J'avais (il y a longtemps) vu la bande annonce.
[il se peut que quelques spoilers se baladent dans mon avis très personnel...]
Bien, bien, bien...qu'ai-je trouvé dans ce film? Et bien beaucoup de choses qui me font apprécier un film, à vrai dire. La forme est splendide, et le rendu est étonnant. Le choix des couleurs, des non-couleurs, des ombres, des musiques, de la mise en scène...que du bon boulot.
Mais je n'ai pas apprécié que cette esthétique sans précédent au cinéma. J'ai beaucoup aimé les personnages. D'accord, c'est très manichéen, mais j'ai trouvé ça plutôt bien utilisé. Bien sûr, peu d'entre nous se retrouveraient, au premier abord, dans des personnages comme Marv ou Dwight, ou comme Nancy ou la copine de Dwight (j'ai plus son nom, là). Pourtant, j'ai trouvé ces personnages splendides dans leur humanité, enfin particulièrement Hartigan, Marv, Nancy, la prostituée qui vend ses copines...
Hartigan est le stéréotype du flic incorruptible, pourtant son passé revient le tourmenter quand il pense avoir trouvé la paix. Le violeur à la tête jaune, je l'ai plus ressenti comme une manifestation de ses démons intérieurs que comme le retour du bad guy du début. Ce type était cuit, je m'en battais les steaks à ce stade du film. Ce que j'ai vu, c'est Hartigan combattre son propre démon qui lui disait de céder à la tentation présentée par l'innocente Nancy, ennemie de son sauveur bien malgré elle. Hartigan, je l'ai vu comme le dernier rempart d'honnêteté, dans une ville pourrie jusqu'à la moelle, qui pourtant cède, rongé par ses propres valeurs. M**de! La société nous empêcherait-elle d'être ceux qu'on veut être, de conduire notre propre destin? Je repense à Nietzsche, faut que j'arrête.
Marv m'a semblé sublime dans ses motivations, son humanité, sa sensibilité. On fait la route pendant un temps avec un gars qui perd les pédales, détruit par une vie pourrie, dans une ville pourrie, par des gens...spéciaux. Il est conscient (sans vraiment l'être) de sa folie grandissante, pourtant il va jusqu'au bout de ses motivations et remplit son but ultime. C'est comme quand on est perdu en plein brouillard et qu'on doit se raccrocher à quelque chose avant de sombrer et disparaître: Marv s'est raccroché à Goldie, qui pourtant ne voulait que l'utiliser. L'humanité dans tout son désespoir, sa faiblesse et sa force.
Dwight m'a vraiment paru spécial. Un gars qui n'aime pas sa vie, pourtant qui continue à protéger un monde sans honnêteté ni sécurité véritable. Il vit dans la m**de, mais il veut changer ça, c'est un héros et un criminel à la fois, un vigilant extrême dont le seul vrai but m'a semblé être la fierté, la reconnaissance, le pouvoir de s'imposer à une société qui ne l'aurait pas accepté en temps normal. Quoi de plus humain? Et que dire de la scène dans la voiture? De ce dialogue intérieur hilarant et pourtant choquant? Est-ce qu'on peut en arriver à ce point là? J'ai trop de réactions à chaud pour me souvenir parfaitement de la scène mais j'en garde une trace saisissante. Au delà d'un petit délire de monsieur Tarantino, j'y ai vu un homme qui parlait à sa conscience encore moins clean que lui. C'était comme si plus il réfléchissait, plus il sombrait dans cet univers glauque et sans issue. ça rejoint un peu l'idée du cercle vicieux, et la question de comment en sortir. Dwight a-t-il vraiment gagné à la fin? Il a la reconnaissance de cette société marginale qu'il désire, mais rien ne changera jamais: les morts peuvent revenir le hanter dans son esprit, d'autres incidents forceront sa communauté à affronter les flics, ou essayer de leur échapper. "Sa Walkyrie" n'est que le signe de la fin d'une bataille qui en précède bien d'autres encore, jusqu'à arriver à l'affrontement final, qui engendrera un nouveau monde, où tout se répétera encore. Le cycle est instoppable à Sin City, le cycle est instoppable dans notre vie. L'humanité a répété les mêmes actions inlassablement, et c'est bien parti pour recommencer, du moins c'est c'que j'me dit en regardant par la fenêtre, en regardant ce qui se passe dans le monde.
Vous savez ce que j'ai trouvé de fantastique avec ce film? Il n'y a que des super-héros, mais pourtant il n'y a que des êtres immoraux et torturés par le mal. Un superbe mélange qui donne des personnages charismatiques avec de vraies motivations, de vraies émotions, de vraies personnalités. Et j'ai pas souvent vu ça dans un film venant d'un comic book.
J'ajoute que Monsieur B a surligné un point qui me parait tout a fait intéressant: notre réaction face à la violence. Bien sûr, ce qu'on voit dans ce film est allégorique, hyperbolique, poussé à son paroxysme, mais pourtant...c'est passé comme une lettre à la Poste. Tout m'a paru normal, du moment que j'admettais être plongé dans cet univers répugnant et repoussant. Mais comment ne peut-on pas penser à la fin du film..."wouha...c'est à ça que ressemble le monde?". On en est pas encore là, c'est sûr, mais j'ai adoré cette espèce de mise en abîme. Les personnages nous parlent dans leurs monologues, comme des héros de comics, et nous entraînent dans leurs pensées.
"Hey toi, ouais toi, derrière ton écran là, regarde bien, c'est comme ça que ça pourrait se passer...après tout, nous ne sommes qu'humains."
Pour conclure cette réaction à chaud après mon premier visionnage, je peux dire que j'ai apprécié Sin City dans le fond comme dans la forme. Moi qui ai du mal avec les films artistiques visuellement parlant, je dis bravo, je dis merci pour ce superbe film.
J'en avais besoin après cet immondice de FF2. Mince, j'espère que ça n'influera pas mon opinion sur Iron-Man...