de Monsieur B » Mer 28 Jan 2009, 16:42
Tiens un copié collé d'un post du 28 Janvier 2008 qui s'était perdu dans le topic "vous lisez quoi en ce moment ?"
Pourquoi le Spirit de Darwyn Cooke m'a déçu, un article plein de tristesse contenue et de soupirs réprimés par Basile :
Cooke est au sommet de son art, plus aucune hésitation dans son trait qui désormais précis et ultra fin. Peut-être un peu trop d'ailleurs.
Car l'ambiance urbaine et sale du Spirit ressort davantage avec un trait plus "sale", moins défini, moins lisse. Un encrage plus charbonneux aurait été le bienvenu.
Point de vue storytelling il est une de mes références privilégiées (je vous laisse trouver les autres) et cet album comporte toujours d'excellentes transitions entre cases (en général des trois temps, modèles de lisibilité). Mais l'ensemble aurait gagné à respirer davantage, le format étouffe complètement la composition que Cooke met en place. Un album oversized aurait été appréciable pour laisser s'exprimer la mise en page mais le format n'est pas le seul fautif. Cooke s'est laissé embarquer dans la surcharge visuelle. Attention, ces cases ne sont pleines de détails inutiles qui les rendent illisibles (on n'est pas chez McFarlane et cie tout de même). En réalité chaque case prise individuellement est sans reproches. Mais mises l'une à côté de l'autre on voit que ça ne fonctionne pas.
Ce qui est étonnant quand on voit comment l'animal se débrouillait sur une série urbaine comme Catwoman, avec emploi magistral de petites cases (les enfants si vous vous intéressez à la bd, notez ceci : les grands dessinateurs savent utiliser les petites cases pour raconter leur histoire, méfiez vous des poseurs qui ne dessinent que des posters double pages). Mais là régression réelle, il n'y a plus cette fluidité de naguère. Mon humble avis sur la question (et là je vais faire un raccord avec ce que je disais précédemment sur le trait et l'ambiance urbaine de la série) c'est que Cooke a complètement négligé sa gestion des silhouettes et des ombres. Son album du Spirit est trop "éclairé", il n'y a pratiquement pas d'aplats de noir pour figurer, suggérer. Tout est montré sous les projecteurs, façon photos prises en studio. Ça lui permet de se faire plaisir sur les visages et autres mais ça fait toc. Là réside la différence avec son run sur Catwoman, où les cases étaient pourtant parfois plus petites et plus nombreuses que sur le Spirit mais où le noir avait son mot à dire et pouvait s'exprimer pour faire fonctionner le récit.
Alors bien sûr ça reste beau (la couverture est magnifique, de même que certaines pin up) mais en tant que bande dessinée ça ne marche pas (ou alors trop rarement) et en plus c'est vide.
Oui parce que je m'y attendais un peu là par contre, à avoir un contenu léger mais quand bien même : encore de la grosse déception. Les histoires sont gentillettes, simples c'est du vite lu vite oublié. Ça peut être sympatoche, à l'image du team up avec Batman mais ça manque trop de substance et ça finit par oublier de restituer la dose de fun attendue d'une lecture retro pulp. Pas de frisson (il savait y faire sur New Frontier pourtant !), peu de rire et encore moins de "wahouuuu !" (on est loin de la scène du train dans Catwoman : le grand braquage).
Il est passé juste après la lecture du Rocketo d'Espinosa et la comparaison fait vraiment mal, le second étant à des années lumières de créativité alors que les deux dessinateurs se valent à mes yeux. Simplement l'un s'est contenté d'enfiler des pantoufles, et ça c'est vraiment regrettable quand on a du talent. J'espère qu'il va quitter DC et se mettre à faire du creator owned.
Je précise que je suis un fan absolu du monsieur.
"Once a depiction veers toward realism, each new detail releases a torrent of questions that exposes the absurdity at the heart of the genre. The more ‘realistic’ super heroes become, the less believable they are."
David Mazzucchelli