Avec Katrina Moldoff, Batman : L'Alliance des Héros ajoute à son immense galerie l'héroïne Batwoman, dans une totale appropriation, pas forcément remodélisée comme on pourrait l'attendre. Le changement est tel que la VO ne la nomme jamais en tant que telle, optant pour « Bat-Lady », et que l'équipe créative lui fabrique un nom civil en hommage à Sheldon Moldoff. Cet affranchissement patronymique des Batwomen traditionnelles serait dû, selon Ben Jones, à des réticences émises par DC Comics face aux déviances de cette version pouvant nuire au personnage, sur le point d'être rebooté en comics. Ce qui n'empêche en revanche guère la VF de gratifier les spectateurs de l'appelation chargée « La Femme Chauve-souris » certes raccord avec la dérision de Batman : L'Alliance des Héros.
Katrina Moldoff est en effet un personnage tragique et pathétique, cas suffisamment rare pour être souligné au milieu de la bonne humeur générale de la série. Sa brève carrière de super-héroïne est avortée de manière brutale et très réaliste, tel que cela pourrait subitement arriver pour Batman ou n'importe quel justicier masqué, condamnant Katrina à stopper son action, l'enfermant dans la solitude et par extension dans la spirale de la dépression.
Vaincue par la nostalgie, Katrina cède. Le choix de Felix Faust comme partenaire n'est pas innocent. Outre les besoins d'un adversaire magique, Katrina est bien entendu la Faust de l'histoire, succombant à la tentation du mal devant sa misérable condition. L'épisode met en exergue la tournure différente qu'auraient pu prendre les évènements, si l'héroïne avait été aidée psychologiquement par ses proches qui ont préféré l'abandonner. Bien plus qu'une femme chauve-souris, elle est l'avatar de personnalités déchues, auréolées un temps par la gloire, le succès et le bonheur, et qui finissent un jour oubliées et ignorées de tous. Son allure d'actrice hollywoodienne renforce et précise cette image. On se souviendra alors du cas de Baby-Doll dans Batman TAS, également tournée vers le culte d'un passé lumineux à jamais révolu. Malgré ce virage conséquent, et son goût pour jouer les femmes fatales, il subsiste en Katrina quelques traits de la Batwoman classique. Plutôt qu'homosexuelle, elle se révèle quelque peu féministe, se pensant victime de la discrimination et de la hiérarchie sociale des sexes.
Son arrestation et le jugement moralisateur énoncé par Batman, même s'ils correspondent à l'esprit de la série, peuvent ainsi laisser un goût amer au public, vu le pouvoir d'empathie que suscite Katrina Moldoff. D'autres pourront cela dit considérer son comportement enfantin et ne pas s'attarder sur son cas. Dénuée d'expérience sur le terrain, agissant sans subtilité et surtout, sans réel altruisme, seulement avide de sensations fortes, Katrina avait été en quelque sorte punie par le Riddler pour s'être aventurée sur un terrain qui n'est pas le sien et qui ne pardonne pas. Son caméo dans Mitefall!, même s'il tient de la volonté absolue de réunir le gigantesque trombinoscope de la série dans un ultime tomber de rideau, peut être éventuellement interprété comme la preuve d'un futur de rédemption pour elle, une fois sortie des barreaux.
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